10 juil. 2008

Démocratie sociale et les cadres

Le projet de loi portant sur la "rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail" qui vient d'être adopté, interpelle à juste titre.
Je m'attarde sur deux points du volet du projet consacré au temps de travail.

Le régime des forfaits des cadres est étendu aux salariés dits "autonomes" avec un plafond annuel fixé à 235 jours au lieu de 218 jours actuellement. Un accord d'entreprise peut néanmoins prévoir d'aller au-delà du plafond (dans la limite de 282 jours).
Les accords se feront de gré à gré dans chaque entreprise, l'issue ne pourra dépendre que du rapport de force entre les interlocuteurs. Dans les entreprises de moins de 50 salariés (pas de CE et de syndicat), ce sera la loi de la jungle.


La rémunération forfaitaire sera désormais majorée d'au moins 10 % à partir du 219e jour travaillé. Les cadres et assimilés peuvent se sentir légitimement discriminés dans la mesure où l'heure supplémentaire pour un salarié non cadre est majorée de 25 %. J'ai entendu par-ci par-là que ceci ne concerne que les cadres supérieurs, j'en doute.

8 juil. 2008

Immigration choisie : carton rouge

La commission Mazeaud tacle sévèrement la politique d'immigration du gouvernement. En effet la commission dirigée par Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel et gaulliste historique, dénonce dans son rapport de plus de 150 pages l'aberration de la politique d'immigration de Brice Hortefeux et de Nicolas Sarkozy.

Les sages affirment que "Une politique de quota migratoire global ou par grand type d’immigration n’est pratiquée nulle part en Europe", contairement à ce qu'avait affirmé Nicolas Sarkozy en septembre 2007. Et une politique de quotas n'a aucun sens pour l'immigration irregulière, elle risque même de l'encourager : «L’affichage d’un contingent pourrait avoir, paradoxalement, un effet incitatif».

La commission recommande des évolutions qui vont à l'encontre « des recettes radicales purement nationales» ou des «remèdes spectaculaires mais illusoires».

Le rapport sera-t-il interdit du territoire ce 11 juillet ? Je parie qu'il fera encore parler de lui.

La chasse aux sans-papiers se poursuit

Un email reçu hier informant d'une nouvelle arrestation en préfecture de Nanterre m'a fait penser à l'article de Catherine Coreller paru dans Libération où la Cimade dénonce la chasse acharnée aux sans-papiers. L'évènement s'est passé ce lundi matin; il s'agit d'un homme dont la femme est en situation régulière. Le couple est issu d'Afrique subsaharienne.

Dans son rapport 2007 sur les centres et locaux de rétention, la Cimade explique l'acharnement des pouvoirs publics par la «course au chiffre» induite par les «quotas d’expulsion» fixés annuellement par Sarkozy au gouvernement. En 2007, 35 000 sans-papiers ont été placés en centres de rétention dont «des malades, des vieillards, des femmes enceintes» et 242 enfants. Depuis 2003, début de «l’industrialisation du dispositif d’éloignement des étrangers en situation irrégulière», la durée légale de rétention est passée de douze à trente-deux jours (une directive européenne prévoit de l’allonger à dix-huit mois), le nombre et la taille des centres ont été multipliés (786 places en 2003, 2 000 prévues en 2009), et les objectifs d’expulsion sont en constante augmentation (25 000 pour 2007 non atteints, 26 000 pour 2008).

Pourtant, ces sans-papiers ne sont pas des délinquants. «L’immense majorité des gens que l’on rencontre en rétention sont des travailleurs, affirme Damien Nantes, responsable du service Défense des étrangers reconduits. Certains ont été réguliers à un certain moment puis se sont retrouvés sans titre de séjour et ont continué à travailler.» D’après les observations de la Cimade, ils travaillent essentiellement dans l’agriculture, le textile, le BTP et l’hôtellerie. Ils ont été arrêtés pour certains au guichet des préfectures où ils s’étaient présentés munis d’un contrat de travail ou d’une promesse d’embauche, pour d’autres sur leur lieu de travail.

Le gouvernement ira certainement chercher ces expulsés dans leur pays pour soutenir sa nouvelle politique
d' immigration (de travail). Chut ! il ne faut pas le dire.

3 juil. 2008

Fichage contre relevés de la diversité

Air France qui reconnait relever les origines ethniques de certains de ses stewards et hôtesses (volontaires) depuis 2003, est accusée par SOS Racisme de "fichage ethnique du personnel" et "discrimination raciale dans les affectations de vols" des personnels navigants commerciaux (PNC, stewards et hôtesses).

Air France récuse le terme de fichage et parle plutôt de relevés pour ses vols spéciaux qui sont pour elle un outil de "promotion" de la diversité de l'entreprise.
Le dossier en provenance du bureau du procureur de Pontoise semblerait prendre un vol régulier pour atterrir au parquet de Bobigny.

L'outil "d'équité et de diversité" pour composer les équipages de ces vols (souvent de prestige) est une fiche qui classe chaque personne recensée parmi sept critères "africain, antillais, asiatique, eurasien, indien, méditerranéen, occidental".

A ma connaissance, une loi de 1978 interdit en France de "collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques". Nul n'est censé ignorer la loi...
Et pourquoi seulement 7 critères ethniques? Il me manque par exemple le Sud-Américain, je ne sais où le caser. Mon voisin grec ou turc est-il méditerranéen ou occidental? Je présume que mon copain béké, le tahitien, le canadien ne font aucunement partie d'une même communauté ethnique.

Air France affirme avoir déclaré son procédé à la Cnil depuis février 2004 et que les renseignements à caractère ethnique "ne sont pas obligatoires" et conservés "avec l'accord" du salarié.
Si les renseignements sollicités ont un caractère facultatif, et qui plus est ne peuvent pas toujours être conservés, alors la fiabilité et l'efficacité de l'outil en question se posent. Dans ces conditions, difficile d'atteindre les objectifs fixés (que j'ignore par ailleurs).

Après bientôt 5 ans d'exploitation de ce procédé, seuls 6 % de salariés PNC sont répertoriés, manifestement un vol retardé.

2 juil. 2008

Séquence immigration de l'interview

Voici la bande son consacrée à la séquence immigration de l'interview de Nicolas Sarkozy qui manquait dans mon billet d'hier.

Guy Birenbaum en a fait le sujet de la chronique politiquement incorrect d'Europe1


Les coulisses de l'interview

Fallait-il ou non diffuser l'interview off de Nicolas Sarkozy? La question ne devrait pas se poser. La poser revient à imaginer que le téléspectateur citoyen n'a pas droit aux coulisses pour mieux cerner et comprendre les acteurs de la pièce qui se joue devant lui.

Le fait de voir le président de la République dans les studios de France 3 tel qu'il est au naturel, ne saurait nuire à la démocratie.
A chacun de se faire sa propre opinion.

1 juil. 2008

Peut-on continuer de jouer avec l'immigration?

Je reviens un moment sur la séquence immigration de l'interview d'hier entre Audrey Pulvar et le président Nicolas Sarkozy. J'ai compris qu'il est possible de faire du chiffre (objectif de 25000 reconduites aux frontières) sans contrôler ni arrêter les sans-papiers, d'ailleurs ce point n'a aucune importance à ce moment-là et peu importe la réponse apportée à une question bien précise. L'essentiel est ailleurs.

Pour Nicolas Sarkozy, la politique d'immigration en cours a pour seuls objectifs de "garantir un emploi, un logement " et un confort social à ceux qui veulent venir dans notre pays, lutter contre les négriers qui s'enrichissent en profitant de la misère des immigrés.
Qui pourrait dire non à cette générosité du coeur, ne sommes-nous pas tous des êtres humains avec un coeur à gauche?
Quid de tous ces sans-papiers qui travaillent sur le territoire, dans des secteurs dont personne ne veut, payent les impôts et cotisent pour la sécurité sociale?
Désormais, l'immigration de travail (la bonne) remplace celle familiale (ah! tous ces immigrés profiteurs qui ne vivent que des aides de la sécu & co).
Au fait, l'immigré choisi que l'on va chercher dans son pays aura t-il droit de fonder une famille une fois sur le territoire?

L'essentiel est d'avoir vu Audrey Pulvar faire tout simplement son boulot de journaliste, je vous dis ça va changer!